jeudi 27 décembre 2007
JC interview - Estelle Hanania & Simon Bernheim - Sang Bleu II
JC est quelqu’un de secret. Une trentaine d’années, énigmatique, doux, altruiste, il est toujours accompagné de son fidèle yorkshire Théo. Il fume la pipe, dessine des Bandes Dessinées, qui pour l’instant s’accumulent chez lui dans des cartons à dessins. Sous sa chemise se cachent de petits symbôles «faits maison». Son torse, son ventre, ses bras se sont progressivement retrouvés envahis de signes codés. Nous lui avons posé quelques questions, levant en partie le voile sur le mystère qui l’enveloppe et sur ce qu’il nomme « l’araignée qu’il combat dans son crâne».
Quand as-tu commencé et comment te tatoues-tu?
C’est dans le film « Christiane F, 13 ans, prostituée, droguée » que j’ai vu une scène où elle se tatoue, j’ai pris une bouteille d’encre, une aiguille et voilà. En plus mon grand frère a eu des problèmes et ce film c’est un peu sa biographie. C’était une façon de lui rendre hommage.
Mes tatouages c’est aussi un hommage à G G Alin. Il était salemment tatoué. C’était des gens qui lui tatouaient ce qui leur passaient par la tête. Ca peut aussi s’apparenter aux taulards russes, aux latinos, aux chicanos. Mais moi si je débarque dans un gang les mecs ils vont éclater de rire et ils vont me dire: « putain, soit tu nous dis vite à quoi ça correspond soit on te bute ».
Pour remonter aux origines, quand j’avais 11 ans j’ai rencontré un illustrateur, un peu baroudeur. Sa cave était son atelier, il y avait une affiche qui représentait un Indien avec une cape sur laquelle toute sa vie était représentée en dessins. Ca m’a donné envie de faire pareil, de raconter ma vie à partir de symbôles empruntés mis sur ma peau. Cet illustrateur m’a beaucoup apporté.
Quelles sensations cela te procure-t-il?
Quand je me tatoue c’est un peu des happenings, des performances à huis-clos, c’est douloureux. Des fois je fais ça au cutter. Certains tatouages murissent dans ma tête, d’autres viennent comme ça, d’un coup. Physiquement c’est douloureux et c’est une sorte de transe. Quand je me mets à l’oeuvre, je suis déjà en colère contre moi-même. Je sais que je vais dérouiller un peu avant, pendant et après. Surtout après parce qu’il faut le porter le tatouage. Mais c’est psychologique plus que physique et les meilleurs tatouages selon moi, sont ceux où j’ai le plus dérouillé. Pour paufiner un tatouage, c’est pas rien, c’est point par point, à l’aiguille.
Les tatouages les plus réussis sont ceux qui sont les plus gras, les plus noirs, esthétiquement les plus affirmés, qu’on voit le mieux. Au début ça a commencé avec mon numéro de sécurité sociale, puis un crâne que je m’était tatoué sur le ventre, tous les accès faciles, avec un miroir en face de moi. Après c’est devenu plus difficile, il a fallu que je tourne le bras, que j’attaque les côtés. Il y a un aspect un peu narcissique, j’avoue, c’est masturbatoire.
Un jour je me les ferai enlever. Je le ferai au cutter, au chalumeau, si il faut, mais je me les enlèverai un jour.
Quand je les faisais je ne pensais pas aux conséquences malheureusement. Mais en même temps ça me plait quand je me regarde dans la glace, je me dis c’est pour le futur, peut être qu’un jour on se dira que les tatoos c’était pas si con.
Tu te tatoues toi-même par économie, par manque de moyen ou tu recherches cette esthétique ?
Un tatouage vaut cher, c’est aussi pour ça que je me tatoue moi-même, je préfère dépenser de l’argent pour acheter des disques, des BD, des portes-mines, du tabac...
Mais j’aime cette esthétique-là plutôt que les tatouages extrêmement bien faits, qui sont très jolis, je le reconnais. Les tatouages que je n’aime pas beaucoup ce sont ceux dit «tribaux» qu’on retrouvent dans le milieu du surf, j’aimerais absolument pas en avoir, c’est pas mon esprit le surf, j’ai peur de l’océan.
Moi, je n’ai pas envie d’appartenir à quelque groupe que ce soit. Chacun son truc. Me tatouer c’est revendiquer ma liberté.
Si on a envie de se tatouer je vois pas pourquoi on ne le ferait pas, on est déjà assez fliqués comme ça par les puces électroniques, les trucs ADN je vois pas pourquoi on nous interdirait de nous faire un tout petit plaisir.
Peux-tu nous décrire le sens de tes tatouages?
Il y a le crâne de la vanité des hommes qui finiront tous pareils, ainsi que les femmes, paix à leur âme.
Mon matricule de sécurité sociale, faut être con quand même! J’étais en crise d’identité , je le suis toujours d’ailleurs. Je ne sais pas qui je suis, je cherche.
Mon matricule de l’armée d’où je suis sorti, non-indemne mais sur deux pattes.
La date d’inhumation de G G Allin, suivi de deux dates de naissances, dont celle de ma mère.
Le symbôle japonais exprimant la demeure.
L’étoile du Nord, Sud, Est, Ouest, pour évoquer ma difficulté à me repérer dans l’espace, je suis myope comme une taupe.
La sphère terrestre «l’orange bleue» car nous appartenons tous au même milieu.
Orobouros, le serpent qui se mange indéfiniment la queue.
La croix des orthodoxes remaniée, mais là j’ai déconné.
Le pentacle positif, de la magie blanche et les 2 VV du signe victoire fait avec les mains.
Le tri-castet Brezhonneg, combiné au cercle druidique mais surtout le symbôle du temps, mon obstacle funeste.
Spirit of 69, année des rude-boys, des afrikans wadada.
La clef des champs de la boîte de Pandore.
Le symbôle du loup ancêtre probablement du chien.
La croix de vie égyptienne. Une petite main pour un grand Liberté, Egalité, Fraternité.
L’araignée que j’ai sous le bras c’est celle que je combats dans mon crâne.
Le nombre 84 est une allusion brève au roman de George Orwell.
Un dauphin, habitant du monde du silence.
2 noms de villes tristements connues pour avoir exposées l’homme, la femme et l’enfant aux pires atrocités.
«Plus jamais ça».
Survivre quoiqu’il en soit jusqu’à la mort: «le terminus des prétentieux» Michel Audiard.
Et Tamazine, le «Z» de la liberté Kabyle.
Si quelqu’un imitait tes tatouages?
je lui dirai, fais les mieux, ce serait marrant. Quand même j’aimerais que certains ne soient pas reproduits.
Si quelqu’un te demande de le tatouer?
Non ça je refuse, parce que j’ai pas envie de lui infliger une douleur, j’ai pas envie de foirer le tatouage, ça non, je veux pas être tatoueur, ou alors qu’on m’apprenne dans la grande tradition...
Par contre te faire tatouer par quelqu’un ça te dérangerait pas?
Non, tant qu’il me tatoue pas une croix gammée ou une femme crucifiée ou une connerie comme ça, restons dans le domaine du politiquement correct. Si quelqu’un a envie de faire un truc poétique, rigolo qu’il ne se gène pas. Malheureusement ça sera dans le dos et j’aurai pas moyen de vérifier.
Si c’est un vrai tatoueur, je demanderai qu’il me rattrapent les miens, de repasser une couche par-dessus et de bien les fignoler. Comme ça le mec il aurait déjà la base et si il veut délirer il peut.
Y a-t-il un rapport entre tes bandes dessinées et tes tatouages ?
Oui, quand je dessine je fais des lignes, une succession de points. Le tatouage c’est une succession de points sur la peau. Il y a aussi ce rapport entre le point et la trame de la BD.
De tous les personnages que tu dessines lequel est le plus proche de toi? le Rasta, le détective privé Robert Jonx, le découpeur, les Metalleux... ?
Ah ! Robert Jonx évidement, tout le monde me le dit, t’as trouvé le filon faut l’exploiter.
Qu’est-ce que recherche Robert Jonx?
C’est un détective privé, un type qui veut briser le mal, qui veut arrêter la course du mal et cela dans la tradition de Mégret, Melville, de beaucoup d’autres écrivains, Léo Mallet, Frédéric Dard. Je ne dis pas que je suis à la hauteur mais en tout cas c’est Robert Jonx, c’est Bérurier...
En ce moment tu travailles sur une bande déssinée en particulier?
Oui, je suis sur une bande dessinée de Reggae et il se trouve que j’ai arrété parceque JAH RASTAFFARI MAKONEN NEGUSA NEGAST LION CONQUERANT OF JAJA WADADA OF TRIBE OF JUDAH m’a complètement abandoné et a bien fait, parce qu’il m’a envoyé une épreuve et grace à vous j’ai contourné l’épreuve, j’ai explosé un plomb dans ma tête mais je continue à me soigner et j’ai envie de repartir sur d’autres choses. La BD sur le Reggae j’y retournerai, mais plus tard. J’avoue que Peter Tosh m’a pas beaucoup aidé, il a été très dur avec moi. C’est un personnage qui était poursuivi par les fantômes et il m’a laissé un de ses 49 fantômes.
Un tatouage idéal?
J’aime beaucoup les portraits, des portraits de Bob Marley, Jack Nicholson, Humphrey Bogarth, Marlène Dietrich...
...de Bob Marley! sur toi ce serait un ovni?!
Ouais, non, mais je ne le ferai pas. Je trouve ça juste joli sur les autres...Ceux que je porte c’est ceux que j’ai envie de porter.
Tes tatouages ils sont thérapeutiques?
Il y a 3 sortes de gens à mon avis qui se tatouent:
- celui qui fait un tatouage pour montrer aux autres, pour frimer.
- celui qui fait le tatouage pour lui-même quand il se regarde dans la glace, ou alors pour se défendre quand il se fait enculer dans les douches en prison.
- Et le troisième c’est celui que je respecte enormément, j’en reviens aux Mauris mais y en a d’autres, les indiens, les africains, les tahitiens, les polynésiens, ceux qui se font un tatouage parceque c’est dans la coutume, c’est dans la tradition. Pour le respect des ancêtres, le respect d’autrui aussi pour dire d’où il vient qui il est. C’est une carte d’identité physique.
Moi je suis plus de la deuxième catégorie et mon père aussi. Il s’est fait tatoué des signes particuliers, il ne les montrent pas, il les a fait dans des endroits où on ne peut pas les voir.
Je ne sais pas lequel de moi ou mon père a commencé à se tatouer le premier. ça date de 1996-1997...
Des regrets?
Oui, Il y a des tatouages dont j’ai vraiment honte avec le recul... Ceux des noms de camps de concentrations, Sobibor etc. Au départ je les avais faits en hommage, contre l’oubli. Mais je m’en veux à mort, j’avais pas à le faire, enfin voilà je voudrais me les faire retirer.
Le prochain tatouage si il y en a un c’est quoi?
Le prochain je pensais à « H I M » , His Imperial Majesty, Haïlé Sélassié,
ou «HS» comme «Hors série» ou « Hors Service », c’est un surnom qui m’avait été donné par mon professeur de français, que je respecte. Il se foutait un peu de ma gueule. Il avait dit dans un conseil de classe « cet élève là est HS ». Les autres avaient demandé « Hors Série ou Hors Service? » il avait répondu « un peu des deux ». Mais c’était marrant venant de lui, c’était très drôle. Il m’appelait «l’innommable!» C’était un grand ce gars là, il avait des crises de palu, c’était un drôle de bonhomme.
mercredi 26 décembre 2007
samedi 22 décembre 2007
Sleek Magazine
"Switzerland provides photographer Estelle Hanania with ideal culture conditions for her interest in costums and pagan customs. In the Appenzeller region, for example, strong men totally cover themselves in leaves and branches on New Year's Eve ( which , in some places in this land of precision timekeeping,is celebrated according to the Julian calendar on January 13) and don masks made of animal teeth and bones. Accompanied by the sound of bells and yodelling, they move from farm to farm to drive away evil demons.The strangely touching sight of these Nature Chläuse, who lumber along somewhat clumsily and seem to babble to themselves, would seem better suited to attracting demons-that's if the demons noticed them at all, so perfect is their becoming, natural camouflage. Solo Show at FAT galerie, Paris, March-April 2008."
Sleek magazine
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mardi 11 décembre 2007
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